Cécile DeWitt-Morette et Yvonne Choquet-Bruhat : un hommage à deux femmes emblématiques de l’IHES
Lorsque l’on évoque les chercheuses qui ont le plus marqué l’IHES, deux noms viennent immédiatement à l’esprit : Cécile DeWitt-Morette et Yvonne Choquet-Bruhat.
Toutes deux étaient de grandes scientifiques qui ont contribué à la physique théorique et aux mathématiques à une époque où il était extrêmement rare pour des femmes de réussir une carrière dans ces domaines. Liées par une longue amitié et collaboration, leurs deux histoires sont entrelacées avec celle de l’Institut.
Le mois dernier, nous avons eu la chance de rencontrer et de discuter avec deux des filles de Cécile DeWitt-Morette, Christiane et Nicolette DeWitt, ainsi qu’avec le fils d’Yvonne Choquet-Bruhat, Daniel Choquet, qui nous ont aidés à retracer les liens de Cécile et d’Yvonne avec l’Institut. Ils ont partagé quelques réflexions sur la façon dont leurs mères ont vécu leur rôle de chercheuses.
Cécile DeWitt Morette (1922-2017) était une physicienne française, connue notamment pour avoir fondé l’École de Physique des Houches, où des générations de physiciens ont appris de certains des plus grands scientifiques des 20e et 21e siècles. Cécile a contribué à faire revivre la physique en Europe après la Seconde Guerre mondiale et a joué un rôle clé dans la fondation de l’IHES : c’est elle qui a présenté le fondateur de l’Institut, Léon Motchane, à Robert Oppenheimer, alors directeur de l’Institute for Advanced Study. De leur rencontre est née une relation forte qui a duré des années et qui a permis à Léon Motchane de construire l’IHES et de développer sa stratégie de directeur.
« En tant que physicienne, ce qui comptait le plus pour elle était d’aider d’autres personnes à apprendre et à comprendre la physique. Elle faisait tout ce qu’elle pouvait pour aider les gens, n’importe qui, dans leurs démarches, » a remarqué Christiane DeWitt à propos de sa mère Cécile. Et Nicolette a continué : « Elle était au service d’une plus grande cause : elle voulait vraiment aider les gens à aller là où ils souhaitaient aller. »
C’est dans ce même esprit que pendant de nombreuses années elle a joué un rôle important en tant que membre du conseil d’administration, en s’appuyant sur son réseau, tant en France qu’aux États-Unis, pour accompagner au mieux l’Institut dans sa mission.
Yvonne Choquet-Bruhat est mathématicienne et physicienne. Son importante contribution à la compréhension des équations d’Einstein et de leurs solutions lui a valu une reconnaissance internationale. En France, elle a été la première femme à être élue à l’Académie des Sciences. Elle est arrivée à l’IHES en fin de carrière, alors qu’elle était déjà à la retraite et à l’invitation de Thibault Damour. « Pour ma mère, l’IHES était un havre de paix, un endroit où elle s’est toujours sentie la bienvenue. Les moments qu’elle appréciait le plus étaient les déjeuners à la cafétéria, qui sont de formidables occasions d’échanger avec les visiteurs et les autres chercheurs dans un contexte informel, » a expliqué Daniel Choquet.
Cécile et Yvonne étaient des amies très proches depuis de nombreuses années et leurs liens respectifs avec l’IHES leur permettaient de s’y retrouver. Elles ont également travaillé ensemble à l’écriture de plusieurs ouvrages scientifiques, parmi lesquelles le livre « Analysis, Manifolds and Physics » qui compte plusieurs volumes. « Il est certain que la disparition de Cécile a été une très grande perte pour Yvonne », a commenté Daniel Choquet. Et toute personne actuellement à l’IHES qui a eu la chance de les rencontrer confirmera à quel point ces deux scientifiques françaises fortes, déterminées et d’une grande humanité manquent à l’Institut !