Arrivée d'un nouveau professor junior - IHES
Clément Delcamp IHES

Arrivée d’un nouveau professor junior

Ingénieur de formation, Clément Delcamp part étudier la physique théorique en Angleterre en 2013 avant de passer sa thèse au Perimeter Institute au Canada en 2018. Après des séjours de postdoctorat à la société Max Planck en Allemagne (2018-2022) et à l’Université de Gand en Belgique (2022-2023), Clément Delcamp devient professeur junior à l’IHES en octobre 2023.

La recherche de Clément Delcamp se situe à la frontière des mathématiques (théorie des catégories) et de la physique de la matière condensée, où il s’intéresse plus particulièrement à l’étude des états de la matière.

Une notion centrale dans le travail de Clément Delcamp est celle de symétrie généralisée. Issue de la théorie topologique des champs quantiques, elle a permis d’étendre considérablement la notion classique de symétrie, et de recouvrir la théorie de brisure de symétrie de Landau, qu’il est aujourd’hui possible d’appliquer à des situations à priori hors de sa portée. Tout comme le langage mathématique des symétries classiques est celui de la théorie des groupes, la symétrie généralisée est exprimée à l’aide des n-catégories de fusion. Ainsi, les physiciens peuvent aujourd’hui revisiter le rôle de la symétrie dans divers systèmes physiques sous le prisme de la théorie des catégories.

Dans son travail, Clément Delcamp applique les méthodes développées pendant sa thèse pour les théories topologiques des champs à des théories symétriques discrètes. Idéalement, il aimerait parvenir à la construction d’un dictionnaire entre la théorie des catégories (supérieures) et la physique de la matière condensée. Un de ses outils favoris pour y parvenir sont les réseaux de tenseurs qu’il a étudiés avec des experts de premier plan comme Norbert Schuch, Frank Verstraete et Guifré Vidal. Les réseaux de tenseurs permettent de paramétriser les états et les opérateurs apparaissant en mécanique quantique. L’idée fondamentale est qu’on peut obtenir beaucoup de « grands » opérateurs par recollement d’opérateurs « plus petits ». Cette opération de décomposition contient d’importantes informations physiques, qui, couplées à la représentation graphique des réseaux de tenseurs permet de comprendre le sens physique de constructions catégoriques abstraites. Même si ces méthodes ont permis d’éclairer considérablement la situation en dimension (2+1), il reste encore beaucoup à comprendre en dimension supérieure. Une idée conjecturale importante de John Baez prédit que les systèmes physiques de dimension n sont décrits par des n-catégories. Passer de la dimension n à la dimension n+1 revient donc à un certain processus de catégorification. C’est ce processus que Clément Delcamp essaye de comprendre dans le cadre de la physique de la matière condensée.

A l’IHES, Clément Delcamp prévoit de continuer sa recherche à l’interface entre la théorie de la matière condensée et la théorie des catégories. Il a déjà échangé au sujet d’une possible collaboration avec le mathématicien Edmund Heng qui vient de prouver une version du théorème de Gabriel pour les catégories de fusion. Avec Slava Rychkov, il espère aussi reprendre ses travaux sur la renormalisation des réseaux de tenseurs.