L'expérience montre, et la moisson de médailles Fields démontre que l'IHÉS est une réussite - IHES

L’expérience montre, et la moisson de médailles Fields démontre que l’IHÉS est une réussite

Témoignage de Marcel Boiteux – Petit Mémorial pour les 40 ans de l’IHES

40 ans déjà pour l’IHÉS ! Mais plus encore pour l’idée géniale de son fondateur, Léon Motchane, qui bataillait déjà depuis quelques années pour trouver les soutiens indispensables à son projet.

EDF avait été sollicitée. Pierre Massé, qui était encore directeur général adjoint d’EDF avant de devenir Commissaire Général au Plan, m’en avait parlé. Créer à Paris une sorte de Princeton européen pour accueillir quelques jeunes savants de tout premier plan, c’était là une aventure singulière, ne serait-ce que pour échapper aux règles de la fonction publique française et aux obligations comptables qui les accompagnent.

Pierre Massé n’avait pas besoin de mon avis pour être convaincu, mais il lui fallait un vis-à-vis pour en parler. Aussi connaissais-je déjà l’IHÉS lorsque, plus tard, je fus désigné pour en devenir administrateur.

C’était alors Renaud de la Genière, Gouverneur de la Banque de France, qui présidait le Conseil. Il n’avait d’autre connaissance en mathématiques ou en physique théorique que celle de l’honnête homme qui a lu, à l’occasion, quelques ouvrages de vulgarisation. Mais c’était un sage, et sa position dans L’Establishment lui assurait une grande autorité. Au surplus le Conseil ne discutait pas de mathématiques, mais de ressources financières, de coûts salariaux et d’équilibre des comptes ; son incursion dans les Sciences se limitait à examiner les propositions qui lui étaient faites pour le recrutement des nouveaux savants appelés à remplacer ceux qui avaient essaimé. Je n’eus donc pas trop de complexes à lui succéder, malgré les apparences de compétence que me conférait une vieille agrégation de mathématiques.

Que les savants, de temps à autre, essaiment et suscitent ainsi renouvellement et rajeunissement, c’était une bonne chose même si, sur le moment, l’Institut avait l’impression de perdre un morceau de sa chair. Mais que les mécènes aussi essaiment, c’était autrement fâcheux ! Le premier souci d’un président de l’IHÉS, c’est de trouver de l’argent. Le deuxième, c’est de choyer les représentants des organismes ou instituts étrangers qui veulent bien apporter leurs avis et leurs subventions à cet IHÉS, certes devenu prestigieux, mais situé en France et qui fait parfois concurrence à des instituts de leur propre pays, eux aussi avides de subventions.

L’examen des comptes et des budgets préparés par le directeur relève d’une utile routine. Débattre sur le choix des nouveaux savants qui viendront relayer les partants est certainement plus gratifiant. L’expérience montre, et la moisson de médailles Fields démontre, que le processus de ces choix a été heureusement conçu par le fondateur : l’IHÉS est une réussite.

Mais plus rare, et très important, est le renouvellement du directeur. J’eus l’insigne responsabilité d’y procéder deux fois au cours de mes neuf ans de présidence. A vrai dire, le choix de Marcel Berger était pratiquement fait quand j’arrivai, et mon modeste rôle fut de canaliser les quelques traumatismes qu’engendre inévitablement, dans une petite structure, un changement de patron.

Par contre, la nomination de l’actuel directeur, Jean Pierre Bourguignon, je l’assume pleinement. Mais j’aurais des scrupules à exagérer mon rôle. Le choix d’un nouveau directeur est l’aboutissement d’une longue maturation dans le milieu scientifique, avant que s’établisse le consensus que le Conseil avalisera. Le président serait responsable d’un mauvais choix. Il n’est pas pour grand chose dans un bon choix.

En revanche, et cela n’arrive qu’une fois pour chaque président, la recherche de son successeur ne repose que sur ses épaules. Irais-je ainsi jusqu’à dire que c’est en partant qu’un président assume sa principale responsabilité ? En tous cas, c’est une responsabilité importante.

Je souhaite plein succès à mon successeur, pour le plus grand bien de l’IHÉS et de son renom à travers le monde.

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